SIENA ROOT "kaleidoscope" (nasoni 2006) (Suède) (Heavy prog)
LA CRITIQUE DE MONSIEUR O.
Les esprits chagrins diront que c'est un défaut, pour moi, c'est plutôt ici une qualité : Siena Root, groupe suédois (décidément...) part du principe que c'est dans les bons vieux chaudrons qu'on fait les meilleures potions magiques. Kaleidoscope ne révolutionnera donc pas le rock avec cet album, c'est un fait, mais les années écoulées ont permis de faire mûrir les styles qu'ils décident de revisiter, et c'est donc un breuvage prog maîtrisé, débarrassé de ses éventuels maniérismes et autres pédanteries qui mijote dans la marmite de nos chevelus nordiques. Bannis également les sons kitsch, les prises de son glaciales, place à un bon vieux gloubiboulga dont les vertus nourrissantes nous permettront de passer l'hiver au chaud.
Car il y a de la densité dans Kaleidoscope, des la couenne et des morceaux dans la sature des guitares, des lipides dans la basse moelleuse, des yeux dans le bouillon Korg et de la cellulite dans la grosse caisse. La prise de son est idéale, avec une présence très concrète (on entend parfois les doigts sur la touche de la gratte, et ce grain !!!).
Côté assaisonnement, les amoureux de gros rock '70 seront servis avec des morceaux tout de même assez variés - autant dans la structure qu'entre eux, naviguant à vue entre le bon vieux hard rock, la musique indienne, le blues, le psyché, voire même quelques reflux gastrico-métalleux et autres renvois celtiques. Comme il difficile en pareil cas de ne pas faire de comparaisons (toutes les critiques lues jusqu'ici citent pêle-mêle Captain Beyond, Jethro Tull, Blind Faith, Lynyrd, etc.), on pensera à l'occasion à Janis Joplin pour le chant - en moins acide et déglingos toutefois - parfois à Jimi Hendrix sur lequel KG West a dû se faire les dents, de temps en temps à Floyd (passage planant sur Good and Bad qui fait de l'oeil à Meddle), souvent à Deep Purple période MARK II pour les solos de gratte, mais surtout l'orgue aux accents baroques à la Jon Lord.
Tout ceci est parfaitement digéré, avec une utilisation consommée de gimmicks rock entendus ailleurs, mais qu'on a plaisir a réentendre, et une sobriété dans les effets, que ce soit la disto, l'overdrive, le Mu-Tron, et j'en passe...
La flûte, le sitar et le clavier ne sont pas virtuoses, loin de là, mais c'est quand même bien vu, et le chant de Sanya (dont on regrettera l'absence sur les autres albums de Siena Root) apporte énormément à la réussite de cet album juteux à souhait , dont les morceaux phares sont pour moi (dans l'ordre d'apparition) Nightstalker, Crossing the Stratosphere, et le classieux Reverberations. Pourtant il n'y a rien à jeter dans Kaleidoscope le bien nommé et nos barbus nordiques y gagne leur 6/6 avec félicitations du jury.