Peinture par Lénaïg

BIENVENUE SUR GOLGA IN A SWIRL

Ce blog, initié par Messieurs V. et O. a pour objet de se pencher plus particulièrement sur des albums que nous possédons, soit en CD, soit en vinyl, et d'en proposer une critique chacun.

Comme nous espérons faire naître - ou renforcer - chez nos visiteurs un intérêt pour les artistes que nous aimons, et non servir de plateforme de téléchargement gratuit, les albums qui font l'objet de nos critiques ne sont pas téléchargeables dans leur intégralité. Un seul morceau est publié pour mettre en appétit...

Les playlists de M. V., ainsi que les morceaux de la semaine de M. O. sont disponibles pour une durée de 1 mois seulement.

Tout ceci est sans prétention, et notre but est de nous faire plaisir, mais si vous croisez notre route, n'hésitez pas à laisser un commentaire, c'est toujours agréable.

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mardi 6 juillet 2010

AZAR LAWRENCE - PRAYER FOR MY ANCESTORS












Azar Lawrence - Under Tanzanian Skies

Azar Lawrence, Prayer for My Ancestors, Furthermore, 2008

C'est un peu retour vers le futur, ce disque : un album qui fleure bon l'AACM, avec un titre qui lorgne franchement du côté du continent africain, une (superbe) pochette en triptyque au graphisme mystique, des titres de morceaux de la même eau (Under Tanzanian Skies, Thokole - chanté par le Sénégalais Ibrahim Ba, et accompagné à la kora, Swinging in Exile), spirituels, contemplatifs, acoustiques, avec percussions roots et saxophone déchiré et coltranien.
Mon frangin : "on n'en fait plus, des comme ça ! Il est mort depuis combien de temps, le pélos ?"
Et bien non, Vinz, ce beau petit bout de plastoc date de 2008 !!! Mirâââcle ! Les esprits sont à nouveau parmi nous, tout ne serait donc pas irrémédiablement foutu ? Il y aurait-il donc encore une lueur d'espoir dans ce monde devenu trop cynique ?

Mais d'abord, qui est Azar Lawrence ?
J'ai lu un article il n'y a pas longtemps, je ne me rappelle plus où, dans lequel l'auteur parlait des saxophonistes qui avaient passé leur vie musicale à creuser le sillon déjà bien labouré par John Coltrane. Il se référait à Billy Harper. Et bien, Mister Lawrence semble être de ceux-là. Quand on se penche sur sa carrière jazz, auprès de Miles Davis ou de McCoy Tyner, on dirait effectivement qu'il s'est voué à jouer les remplaçants du maestro. Une discographie solo parcimonieuse (rien de 1985 à 2007, quand il revient avec... Legacy and Music of John Coltrane), et deux albums parus conjointement (Speak the Word et Prayer for My Ancestors) en 2008. Renseignements pris, notre ami n'est donc pas le fruit avarié d'une union contre nature entre Thierry Hazard et Rose Laurens, Dieu merci.

LES ZICOS :

Azar Lawrence - Saxophones tenor et soprano
Nate Morgan - Piano (Morgan joue aussi avec Build an Ark, waou !)
Henry Franklin- contrebasse (bien connu pour ses deux albums sur Black Jazz)
Alphonse Mouzon - batterie (ah, Alphonse... On ne le présente plus !)
Mais aussi, en invités :

Nolan Shaheed - Trompette sur 05
Roy McCurdy - Batterie sur 06
Tony Dumas - Contrebasse sur 07
Reagae Clark - percussions sur 02/04/07
Ibrahim Ba (non, pas le joueur de foot !) - Guitare et chant sur 03
Amadou Fall - Kora sur 03

LA TRACKLIST :

01. Open Sesame (A. Lawrence) - 9:07
02. Under Tanzanian Skies (H. Franklin) - 7:38
03. Thokole (I. Ba/A. Fall) - 5:27
04. Prayer for My Ancestors (A. Lawrence) - 5:08
05. The Baker's Daughter (A. Mouzon) - 8:02
06. Swinging in Exile (N. Morgan) - 5:41
07. Ode to Pharoah (A. Lawrence) - 6:15
08. Linda G. (A. Lawrence) - 5:37

LA CRITIQUE DE MONSIEUR O.

Dès les premières notes de Open Sesame (titre tout à fait adéquat pour ouvrir un disque), on se croit dans un album oublié de Trane. Morgan McCoyTynerise comme un fou (superbe son de piano, un brin feutré, aux antipodes du brillant gavé d'harmoniques de notre ami Dédé Manoukian, cf. critique d'Inkala), Mouzon joue à la batterie le thème du morceau avec autant de conviction que Lenny White sur le Red Clay de Freddie Hubbard, qui est un modèle du genre. La structure est classique ici, et chacun prend son solo à la suite. A noter la prédilection de Morgan pour les martelages d'accords, ce qui contribue à la fougue générale du morceau. Lawrence souffle dans son tenor comme si sa vie en dépendait, et Franklin travaille son chorus comme un walking enfiévré avant de se lancer dans des soubresauts convulsifs. Reprise du thème et fin orgiaque, presque rock'n'roll. Génial ! (******)

Under Tanzanian Skies pose un peu les choses. La grille du thème (qu'on doit à Franklin) est très mystique. La ligne de basse qui ouvre le morceau, malgré sa simplicité, est une tuerie. Le jeu de Morgan, qui déboule d'entrée ses gammes de manière très distinctive, est emblématique du jazz spirituel des années 70, et apporte énormément dans la couleur du morceau. Pour la structure, on garde la même chose que pour le titre précédent, à l'exception d'un thème de fin tronqué, qui évolue vers un nouveau chorus de sax. Lawrence est passé au soprano, et fait son Coltrane comme d'hab', mais c'est-y pas beau ? Les percus sont apparemment à base de graines qui s'entrechoquent en tombant. Superbe. Le chorus de piano est plus déstructuré que dans la première piste, et est un véritable régal pour les oreilles, en jouant à fond la carte de l'ornementation, un peu à l'orientale. Franklin à la contrebasse est plus relax, et voyage entre les espaces-temps avec une science du groove imparable. Un morceau parfait. (******)

Pour rendre tout à fait hommage à ses ancêtres, Lawrence fait un détour par l'Afrique de l'Ouest, en invitant le chanteur/guitariste sénégalais Ibrahim Ba et son compatriote et joueur de kora Amadou Fall à interpréter leur compo Thokole. Rien peut-être de très original là-dedans : c'est une ballade contemplative et étirée dans lequel le saxophone trouve bien sa place sans apporter une plus-value énorme. Ce genre de morceaux garde inexplicablement pour moi le même attrait, et je pourrais en écouter des centaines (c'est d'ailleurs déjà fait...), sans que ça change. C'est calme, ça sent la terre chaude après une pluie d'orage et les grands espaces ; le son peu aigre de la kora m'émeut autant que celui du banjo. Bref, je me fais avoir à tous les coups, et Thokole ne fait pas exception. (******)

Prayer for My Ancestors m'évoque tout de suite After the Rain de Trane (album Impressions, Impulse, 1963). Henry Franklin tisse des nappes à l'archet tandis que le piano, égrène le accords comme sur Tanzanian Skies. Un très beau morceau contemplatif, dont la mystique est renforcée par des percus à nouveau très roots. Le genre de titre dont on attend en permanence un décollage qui ne vient jamais. Lawrence se montre très lyrique, et chaque phrase n'est qu'un chemin différent qui vient se poser doucement sur la fondamentale, comme une évidence. Bref, un truc vachement organique, vachement spirituel, vachement humain, quoi ! (******)

La fille du boulanger chez qui notre ami Alphonse Mouzon achète son pain (des baguettes, sans doute !!!) doit être bien jolie pour lui avoir inspiré la composition du titre suivant, morceau davantage dans la veine hard-bop, bien speed et tout. Pour l'occasion, la bande fait appel au trompettiste Nolan Shaheed, qui tricote et enchaîne les motifs, dont les contours sont exprimés avec une bonne précision de jeu, assez dans la manière de Clifford Brown, avec moins d'idée quand même, à l'image de la fin de son chorus, qui se termine sur une septième mineure au terme d'une phrase bien jolie, mais entendue à peu près un milliard de fois... Ceci dit, le chorus pris à deux soufflants qui s'ensuit est tout à fait réjouissant. (*****)

Le thème de Swinging in Exile, est pour moi comme un mix entre La lac des cygnes de Tchaïkovsky, Pierre et le loup de Prokofiev, et la bande originale de Harry Potter, par John Williams (!!??!!). Niveau sensibilité et énergie, on reste dans la droite ligne du morceau précédent, avec une pointe de mysticisme oriental en plus. Un bon titre à la structure classique sur lequel Lawrence s'époumone avec une intensité louable. (******)

Ode to Pharoah. Pour son hommage à Pharoah Sanders, Lawrence ressort son soprano et nous propose une ballade feutrée. Alphonse Mouzon prend ses balais et écrase une larmichette. Tout le monde se met au diapason, et moi j'aime bien ce que fait Henry Franklin, très classe et tout en retenue. Nate Morgan se révèle être un grand romantique, et les percus de Clark scintillent de partout dans la nuit soyeuse et étoilée. (******)

Linda G. est un titre coltranien par excellence (cf. Mr. P.C., sur Giant Steps, Atlantic, 1960), composé par Lawrence (on ne se refait pas !). Une bonne façon de terminer un album sur lequel, on l'aura compris, l'ombre du maître plane de bout en bout. Lawrence y va comme en 14, Morgan s'essaie brièvement à des petits plans type swing old school pour amorcer son bon chorus et arrive même à caser des accords latino sur le thème de fin, Alphonse Mouzon en fait des tonnes (il est vraiment génial, ce type !), bref, tout le monde se lâche bien sur cette pièce finale, qui mérite aussi son ******.

CONCLUSION

Bon, d'accord, tout ceci ne révolutionne pas le jazz, mais comme ça fait du bien d'entendre dans un disque contemporain touteu la musi-queu que j'ai-meu. Les musiciens sont tous des brutes, et paraissent vraiment s'éclater comme des petits (ou des gros, suivez mon regard) fous. C'est beau, jubilatoire, pénétrant. Bref, il y en a pour tous mes goûts. A chaque instant de la journée, l'essayer, c'est l'adopter !

On pourra également se jeter à corps perdu dans :

Kenny Garrett, Pursuance - The Music of John Coltrane, Warner Bros, 1996
Billy Harper, The Believer, Baystate, 1980
Billy Harper, Capra Black, Strata East, 1973
Billy Harper, Love on the Sudan, Nippon Columbia, 1977
Billy Harper, Soran-Bushi, BH, Denon, 1979
Ali Farka Touré & Toumani Diabaté, In the Heart of the Moon, Nonesuch, 2005
Mtume, Rebirth Cycle, Third Street Records, 1977
Henry Franklin, The Skipper, Black Jazz Records, 1972
Yusef Lateef, In Nigeria, Landmark, 1985

LA CRITIQUE DE MR.V

Pour moi Azar Lawrence c'était l'homme de 2 albums fabuleux : "bridge into the new age"(1973/74) et "summer solstice" (1975) c'était aussi un fantastique sideman : sur les albums de McCoy Tyner "Sama layuca" (qui pourrait devenir un des albums fétiches de MR.O) "Enlightenment","atlantis" mais aussi sur "new agenda" d'Elvin Jones et sur "rebirth cycle" de Mtume..... bref Azar lawrence c'était trés trés bon, mais aujourd'hui, à des années lumière de la folie créative des 60/70's qu'est'il devenu!?

01 open sesame (******) Dés les premières notes tout est déjà joué : l'album tant attendu est enfin arrivé! Quelle belle surprise, le père Alphonse est mordant comme au bon vieux temps ,le père Henry a sa belle sonorité boisée et l'amie Nate assure comme une bête! quant à Azar c'est du grand art!!! Un quintet de folie.
02 under Tanzanian (******) le spiritual jazz me bouffera l'âme toute entière.
03 Thokole (******) Titre à part mais pas moins magnifique.Une ballade Africaine de toute beauté.
04 prayer for my ancestors (******) Un beau titre pour un beau morceau. Amis mélomanes, achetez cette album, amis non-mélomanes, élevez vos âmes et ouvrez les oreilles ça vaut le coup!
05 the baker's daughter (******) Du pur bon jazz
06 swingng in exile (******) Quelle belle sonorité , le ténor est roque et sifflant comme j'aime.
07 ode to Pharoah (*****) Petit bémol pour ce titre hommage à Pharoah Sanders je suppose, je m'attendais à quelque chose de plus intense, de plus criant, de plus African jazz.
08 Linda G (******) Une belle fin qui ne déçois pas.

CONCLUSION

Un grand merci MR.O pour avoir mis le doigt sur ce magnifique album, voilà pourquoi GOLGA existe, vraiment les 4 premiers morceaux de cet album sont fantastiques, je manque de superlatifs, c'est un 7/6

A ECOUTER AUSSI

-Michael White "the land of spirit and light" (impulse 1973)
-John Coltrane "love supreme" (impulse 1964)
-Pharoah Sanders "thembi" (impulse 1971)
-Marion Brown "vista" (impulse 1975)
-tous les album d'Alice Coltrane
-tous les albums cités plus hauts et ceux cités par MR.O..... et j'en oublie!



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